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Canicule : à quoi s’attendre et comment s’adapter ?

C’est l’un des impacts les plus emblématiques du changement climatique : la France fait face à des vagues de chaleur de plus en plus fréquentes et intenses. Végétaliser, isoler les bâtiments, prévenir, etc : des solutions existent pour en atténuer les effets ressentis. Elles sont à amplifier rapidement pour que notre pays, notamment les villes, restent vivables.

Sun

4 fois plus

de jours de canicules

cette dernière décennie que dans les années 1980

1 500

records de chaleur

en 2022, l’année la plus chaude jamais enregistrée, avec 14,3°C de température en moyenne, et 10 mois de l’année plus chauds que la normale

5 fois plus

de jours de vagues de chaleur d’ici 2050

COMPRENDRE

De quoi parle-t-on ?

  • Pic de chaleur : épisode bref (24 à 48 heures) durant lequel les températures dépassent nettement les normales de saison (localement ou nationalement).
  • Vague de chaleur : épisode de températures nettement plus élevées que les normales pendant plusieurs jours (définition à l’échelle nationale).
  • Canicule : épisode de températures élevées, de jour comme de nuit, sur une période prolongée (au moins trois jours) qui est susceptible de constituer un risque sanitaire notamment pour les personnes fragiles ou surexposées (définition à l’échelle départementale). Les seuils qui définissent la canicule sont calculés par département. Par exemple, à Toulouse, 36 °C jour/21 °C nuit contre 33° jour/18° nuit dans le Nord.
  • Îlot de chaleur urbain (ICU) : ce phénomène désigne la différence de température de nuit entre une ville, plus chaude, et la campagne qui l'entoure, plus fraîche. Pourquoi fait-il plus chaud en ville qu’à la campagne ? La ville, trop artificialisée, est désavantagée face à la chaleur. On y trouve : 
    - Peu d’eau retenue par les sols, alors qu' en s’évaporant, elle contribue à rafraîchir l’air.
    - Peu d’arbres offrant une ombre protectrice et un effet rafraîchissant (par évapotranspiration).
    - Beaucoup de matériaux qui stockent la chaleur, comme le béton ou le goudron de couleur sombre de nos routes et de nos parkings.
    - Une forte densité de bâtiments qui peut freiner la circulation de l’air (une place publique est généralement plus exposée aux vents rafraîchissants).
    - Une forte activité humaine : par exemple, la climatisation, en même temps qu’elle refroidit l’air intérieur, réchauffe l’air extérieur. Attention, ces écarts entre le cœur de ville et le périurbain ont tendance à diminuer car avec la hausse des sécheresses, la végétation manque d’eau et ne peut plus jouer son rôle rafraîchissant.
  • Pollution : les températures élevées favorisent la formation d’ozone dans l’air à partir des gaz émis par des sources naturelles ou humaines. Par temps calme et ensoleillé, cet ozone stagne dans l’air, et représente un danger pour notre santé (voir notre dossier thématique Santé).

Quel est déjà l'impact du changement climatique ?

D'ores et déjà, du fait du changement climatique, les vagues de chaleur ne cessent d’augmenter en fréquence et durée. Depuis 1947, on recense 49 vagues de chaleur à l’échelle nationale avec une augmentation de leur nombre après les années 2000 : 
- 17 vagues de chaleur avant 2000 (sur une période de 50 ans, 1947-2000) contre 32 après (sur une période de 25 ans, 2000-2025).
- 12 jours par an de canicule en moyenne cette dernière décennie (2013-2022) contre 3 jours entre 1980-1989.

Depuis 2000, une vague de chaleur se produit quasiment tous les ans, voire, plusieurs fois par an. Avant 1989, c’était un été sur cinq en moyenne.
Michel Schneider | Climatologue - Météo France

 

 

A quoi s'attendre demain dans une France à +4°C?

Selon les hypothèses de Météo France et le scénario de référence retenu par les autorités françaises (Trajectoire de Réchauffement de référence pour l’Adaptation au Changement Climatique) :
- le nombre de jours de vagues de chaleur devrait être multiplié par cinq en 2050 (+2,7°C), et par dix en 2100 (+4°C).
- les vagues de chaleur gagneront aussi en intensité. Dans ses scénarios les plus pessimistes, Météo France prévoit la possibilité de canicules cinq fois plus longues que celle de 2003.
- les vagues de chaleur pourront se produire à partir de début juin et jusqu’à mi-septembre (contre mi-juin et mi-septembre actuellement) en 2050, et même dès la mi-mai et jusqu’à fin septembre en 2100.

Evolution du nombre de nuits chaudes dites tropicales en 2050, puis en 2100
© Météo-France

Il est urgent d'agir

Fatigue, effets cardiovasculaires, respiratoires, naissances prématurées… Ces épisodes caniculaires posent de nouveaux défis en prévention et en santé. La chaleur a un effet immédiat sur l’organisme : dès les premières augmentations de température, le corps humain active des mécanismes de thermorégulation pour compenser (transpiration, augmentation du débit sanguin au niveau de la peau par dilatation des vaisseaux cutanés, etc.). 

Sur-mobilisés, ces mécanismes peuvent engendrer maux de tête, nausées, crampes musculaires ou déshydratation. Le risque le plus grave : le coup de chaleur, qui peut entraîner le décès. Les canicules entraînent une surmortalité : en 2022, les épisodes caniculaires ont causé la mort prématurée de 2.816 personnes en France (source : Santé Publique France). 

Lire aussi notre dossier thématique Santé.

Ces nuits où on ne récupère pas

Les nuits plus chaudes en période de canicule (dites « nuits tropicales ») mettent à mal notre sommeil et nos capacités de récupération. Loin de s’habituer, plus ces nuits sont fréquentes, plus notre corps fatigue et plus le risque sanitaire augmente.

AGIR

Comment adapter son territoire aux canicules ? Les collectivités et les acteurs locaux ont un rôle clé pour protéger le territoire et ses habitants des vagues de chaleur. Au-delà des gestes de prévention, de nombreuses solutions permettent d’atténuer de façon considérable les effets ressentis, notamment en ville : végétaliser les rues, choisir de nouveaux matériaux, isoler les bâtiments, jouer sur leur orientation... Le point sur les possibilités d’action.

Planifier et anticiper les canicules

Le guide Orsec détaille les actions possibles de chaque acteur territorial en amont, en cours de veille et lors d'une crise. La gestion sanitaire des vagues de chaleur s’appuie sur les obligations réglementaires de soutien aux populations :

  • pour les communes : le plan communal de sauvegarde, le registre communal nominatif des personnes âgées et handicapées, le recensement des lieux et pièces climatisés ou rafraîchis (bâtiments communaux, crèches, Ehpad…), le bon fonctionnement et l’entretien du réseau d’eau potable de la commune ainsi que des points d’eau gratuits.
  • pour les employeurs : le document unique d’évaluation des risques professionnels. Le décret du 27 mai 2025 précise également les obligations des employeurs face à la chaleur.
  • pour les établissements médico-sociaux : le plan bleu, le plan de gestion des tensions hospitalières et des situations sanitaires exceptionnelles.

Le plan Canicule,
15 actions phares

En complément du plan Orsec, le gouvernement annonce 15 actions pour anticiper les canicules : recenser les îlots de fraîcheur et les fontaines publiques, diffuser des messages d’information sur les risques incendie dans les transports, sensibiliser des organisateurs d'événements sportifs et culturels en cas de vague de chaleur, etc.

Télécharger le plan canicule

Vagues de chaleur : comment gérer la crise ?

Un dispositif national de vigilance météorologique avertit les pouvoirs publics et les populations en cas de vagues de chaleur entre le 1er juin et le 15 septembre. Une carte nationale de vigilance et un bulletin de suivi sont actualisés au moins deux fois par jour à 6h et 16h sur le site de Météo France. Trois couleurs indiquent le niveau de vigilance et les actions à mener selon ce niveau. 

  • Une alerte jaune désigne un pic ou un épisode persistant de chaleur, avec un risque pour les populations fragiles ou surexposées. Il faut veiller sur ces personnes les plus vulnérables, limiter les activités extérieures et rappeler de bien s'hydrater.
  • Une alerte orange correspond à une canicule, avec un risque potentiel pour l’ensemble de la population. Il faut sensibiliser et encourager à modifier ses comportements, inciter à adopter des mesures de protection individuelle et déclencher des plans exceptionnels pour les services publics de soin ou de secours.
  • Une alerte rouge annonce une canicule extrême, avec un risque sanitaire élevé pour l’ensemble de la population et des impacts sociétaux forts (sécheresse, approvisionnement en eau potable, aménagement ou arrêt de certaines activités, etc). Elle implique de restreindre les activités (ex. sorties scolaires, examens, grands rassemblements, manifestation sportive, adaptation des horaires de travail…) et de limiter les émissions de chaleur d’origine anthropique (circulation automobile).

Repenser l'urbanisme pour faire face à la chaleur : végétaliser, adapter les bâtiments

  • La nature est une alliée précieuse pour rafraîchir les villes et villages. Végétaliser, c’est l’une des clés pour faire baisser les températures en ville, scientifiquement démontrée. Un arbre équivaudrait à cinq climatiseurs. Tous les espaces de nature en ville, bois, parcs, jardins (publics, privés ou partagés) contribuent à rafraîchir l’espace, en veillant à respecter quelques principes (lire Planter sans se planter). De même, ré-introduire l'eau est un levier clé. Tout plan d’eau, fontaine, bassin, cours d’eau, aide à faire baisser la température de quelques degrés. Attention toutefois aux solutions trop gourmandes en eau alors que cette ressource vient à manquer en période de sécheresse. Ré-ouvrir des rivières en ville, quand c’est possible, permet d’éviter cet écueil.
     
  • Adapter les bâtiments et l'urbanisme existants devient une nécessité. En France, l’urbanisme des villes n’a pas été pensé pour les fortes chaleurs. Cela ne veut pas dire qu’il faille démanteler les villes existantes. Les solutions sont aussi à trouver du côté de la science des matériaux et de l’ingénierie : favoriser l’isolation thermique du bâtiment, réduire les rayonnements et les transferts de chaleur entre immeubles, privilégier les revêtements clairs à fort pouvoir réfléchissant. Une technique simple et traditionnelle semble faire ses preuves là où elle est utilisée : repeindre son toit en blanc avec une peinture spéciale (dite « cool roof »). C’est un principe de base dans les pays méditerranéens. Il faut bien se renseigner sur les conditions d’utilisation, notamment pour éviter le risque d'éblouissement. Végétaliser les toitures peut aussi renforcer l'isolation du bâti (voir à ce titre, les recommandations de l’Association des toitures et façades végétales).
     
  • Les nouveaux bâtiments et les nouvelles rues doivent aussi être adaptés aux températures de demain.
    - La réglementation RE2020 renforce la notion de confort d’été des constructions neuves. Elle fixe un nouvel indicateur, qui mesure la durée d’inconfort : le « degré-heure », c'est-à-dire le nombre d'heures pendant lesquelles les occupants sont exposés à de fortes températures. Si le projet dépasse le seuil haut, l’équipe doit revoir sa conception.
    - Orienter les rues de façon à faire circuler l’air est aussi une solution à explorer.
    - Mettre en place un réseau de froid urbain peut être une solution pour rafraîchir les bâtiments tout en consommant moins d'énergie. Il existe en France, en 2023, 43 réseaux de froid (source : Fedene). D'ici à 2035, le projet de programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE3) prévoit de tripler le volume de froid livré par ce biais. Principal frein à leur développement ? Le coût. Comme pour les réseaux de chaleur, il est nécessaire d'avoir un nombre initial de consommateurs importants, ou quelques gros consommateurs identifiés, sans lesquels le projet n'est pas viable. A ce sujet, consultez le reportage sur les réseaux de froid à Montpellier.

Voir aussi notre dossier thématique Bâtiment

Pistes pour protéger les plus vulnérables

  • Améliorer la prévention à l’école. Former le personnel périscolaire et des enseignants aux bons gestes à adopter pour protéger les enfants de la chaleur ; adapter les activités (récréations, repas, horaires…) ; aménager les bâtiments et leurs abords, y compris les cours de récréation (végétalisation, préau ombragé, isolation des classes, stores, matériaux absorbant peu la chaleur…)
  • Mieux protéger les sans-abris. Avec l’aide des associations ou du Samu social : améliorer l’accès au logement/à des structures d’hébergement temporaire l’été, accès à l’eau et à l’hygiène. Sensibiliser et alerter les acteurs sociaux et les personnes sans-abri au risque canicule.
  • Préserver les personnes âgées. Mettre en place un système d’appel régulier pour vérifier qu’ils vont bien ; les sensibiliser à l’hydratation ; végétaliser les abords des Ehpad…

    Pour aider les collectivités à remplir leurs obligations de sensibilisation, l’État les invite à diffuser auprès des habitants, notamment les plus vulnérables, les documents préventifs conçus par l’Agence nationale Santé publique France. Mairies et CCAS peuvent utiliser le registre communal nominatif relatif aux personnes âgées et en situation de handicap. Voir le kit communication

Ils le font déjà

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Plus fraîche ma ville

Le rapport du deuxième groupe du GIEC (2022) concernant l’adaptation au changement climatique confirme des craintes déjà établies : les canicules estivales seront plus fréquentes, longues et intenses et vont être le risque majeur en ville pour les décennies futures.

Bat-ADAPT

Bat-ADAPT est une cartographie qui analyse les risques climatiques à l’emplacement du bâtiment avec des projections temporelles à 2030, 2050, 2070 et 2090. Les vagues de chaleur, les sécheresses, les inondations et les submersions marines y sont évalués.

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